Quand je parle à … moi.

Parfois, je m’exprime.. Oui c’est normal jusque là.

À d’autres, oui, bien évidement ; aux chats de la baraque, oui, aussi, mais en grec, parce que je parle grec aux animaux ; au téléphone, en décalé niveau horaires avec les copains, oui, aussi. À beaucoup de personnes vous me direz, mais pas vraiment en fin de compte…

Ici, parfois, il n’y a pas tant de gens que ça à qui dire des choses. Vous savez, les ‘vrais’, ceux qui sont prêts à tout entendre.

Ceux à qui je m’adresse peuvent, à chaque fois, comprendre et analyser ce que je raconte, -quoique-, me donner des conseils ou juste être à l’écoute, et puis parfois non, parce que je ne dis rien.
Parce que ce que je dis, c’est à moi-même.
C’est mon moi qui me parle, et c’est un secret entre lui et moi avant de décider de le mettre à l’écrit.

« …
C’est bien que tu sois partie. Tu sais, t’assures.
Ah ouais tu crois ? C’est pas juste trop idiot ? Partir après le bachelor et ne rien faire de sa vie que de profiter de ce qu’elle a à offrir ? Nan c’est génial.
C’est juste ça la vie, en fait, et personne ne l’a saisi. Si t’es la seule à faire quelque chose, c’est pas parce que c’est anormal, c’est peut-être parce que toi, simplement, toi, t’as compris, et que t’es juste la première à le faire.
Tu crois pas ?
T’as grave raison. « 

– C’est confus parfois ce que je raconte, je vous l’accorde. Mais les réflexions, vous savez, ça va, ça vient, et généralement j’ai beaucoup de répondant aussi, même avec moi-même. –

Je reprends.

 » Tellement de choses te passent en tête… t’arrêtes pas. Et parmi tes songes tu t’arrêtes sur un.

Tu te dis que quand tu rentreras, ça fera un an que tu seras partie. Tu t’en rends compte ?

Un an pendant lequel tu en auras fait des choses de ton côté, ça c’est sûr. Mais un an pendant lequel des choses aussi se seront passées de l’autre côté du globe, auxquelles tu n’aurais pas pensé, des choses qui ne t’ont même pas traversé l’esprit, des choses auxquelles tu ne penses simplement pas, des choses folles ou vraiment très banales. Du tout et du rien, mais aussi de l’inconnu.

Comment ça va être quand tu rentreras ?
La folie ? Pareil ? Un peu en décalé ? Tout chamboulé ?
Tu promets à tes amis que « rien ne changera », mais tu mens, tu le sais bien.

Bien sûr qu’en un an des tas de choses auront changé…

Tu as beau contacter ton frérot qui a déménagé je ne sais combien de fois parce qu’il poursuit ses études, stage, vacances… Tu as beau suivre de loin les aventures de super-tata-sportive devenue une killeuse de la vie… Tu as beau apprendre que ta super coupine est enceinte de sept mois… que ta meilleure pote vit maintenant dans ta ville… que trois de tes acolytes ont emménagé ensemble… que ton meilleur copain a décidé de se la jouer célibataire endurcit avec ses deux chats… que ton trio d’amies chères assure, même séparées elles aussi d’une centaine de kilomètres… que ton autre chouchou lance sa boîte et déchire tout… que ta douceur s’éclate en Italie alors que tu ne savais pas qu’elle baragouinait cette langue…

Ouais. J’ai beau… j’ai beau savoir, mais je ne vois pas. Je ne sens pas. Je ne le vis pas. Ce ne sont que des paroles rapportées. Et je manque des épisodes clairement.

Et quand tu n’as pas de nouvelles en direct, tu regardes le feed d’Instagram et Facebook et stalke de temps à autres des profils que tu ignorais un peu auparavant. Juste histoire de te mettre à jour en quelques sortes.

T’as l’impression de faire une compil de « destins croisés » et de la « rubrique du chat écrasé » du journal quotidien, mais ça te fait sourire, comme toujours.

Une copine de collège qui a un petit gars depuis quelques semaines, un pote de lycée poursuit sa carrière internationale de mannequin, cette pote qui est devenue fièrement hôtesse de l’air, l’autre qui est sur une île perdue aux philippines en tant que moniteur de plongée, celle qui a publié un bouquin comme illustratrice, puis celui carriériste dans la finance, un troisième je-m’en-foutiste de compétition, celui qui se la coule douce en faisant le tour du monde, le suivant qui a encore une autre caisse -remplacer par ‘copines’ également-, et puis l’autre qui travaille d’arrache pied pour faire plaisir à sa famille…
Tellement de vies. Pas la tienne.
Quel bazar.

Tu te souviens quand tu pensais à tout ça ? t’étais un peu envieuse de prime abord pour certains, d’imaginer tout ce que tu loupes, de voir d’autres réussir, de savoir ce qu’ils font, où il vont, avoir un chemin tracé, atteindre leur objectif et leur rêve… mais après un bref moment, tu t’es sentie bien.
Garde ce sentiment. Garde-le bien en tête.

Tu te souviens aussi avoir eu cette réflexion un soir : tu regardais un de tes potes se faire engueuler en live par sa mère -l’angoisse- , et tu te posais la question de si elle ne lui avait jamais dit qu’elle était fière de lui, qu’il faisait un bon taff, qu’elle l’aimait, tout simplement.

Quelques secondes plus tard tu as pensé : « toi, quoi que tu fasses, où que tu sois, et quoi que tu accomplisses, tes parents seront toujours fiers de toi, te le diront » et qu’ »un je t’aime de leur part est l’une des choses pour lesquelles tu es le plus sûre au monde ».

Après ça, tu n’avais plus aucun doute. Pouf ! Ça c’est ce que j’appelle de la chance.

Des questions subsistaient, oui, mais tu savais que c’était certainement ça la vie dont tu rêvais, et ton rêve que tu vivais en un certain sens à ce moment précis. Peut-être pas à cent pour cent, mais il était là, à portée de main, tu étais bien dedans. Tu ne te rends pas compte de ce que tu as et te prends la tête, reste indécise et jalouse de la réussite des autres, puis nostalgique, heureuse pour eux et un peu hors du temps… c’est vrai. De dix à huit heures de différences avec ton monde il y a de quoi perdre la boule non ?

Et puis toi, en fait, t’es là, à l’autre bout du monde, non pas avec ton pop corn dans la main bien assise sur ton fauteuil de ciné à BFM, mais avec tes noix de cajou hors de prix, posée sur la plage à deux cent mètres de chez toi avec le coucher de soleil en seul ami à tes côtés.

Ça te manque, tu as l’impression de rater des trucs, mais pas tant que ça… Car tu ne loupes pas ta vie.

Et tu fais mine d’observer le tout.
À 16810 kilomètres, moi je dis chapeau.
T’as une très bonne vue.

… »

8 commentaires sur « Quand je parle à … moi. »

  1. Ultra fière de toi quoi que tu fasses, où que tu sois. Tu manques c’est sûr, mais savoir que tu kiffes ce que tu fais , que tu rencontres des gens sympas ça fait grave plaisir !
    Continue à profiter au max de ton aventure australienne !
    Yé t’aime mi amor <3
    Et surtout des bisous

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  2. « L’être humain est un éternel insatisfait ». Tu as déjà entendu cette phrase des centaines de fois. Et c’est vrai, on veut toujours plus, on s’interroge sans cesse sur nos choix, on ajoute toujours des « et si » à chaque début de phrase. Et parfois, tu as juste à appuyer sur le bouton ‘stop’. Comme dirait ma mère, « step back and have a look ». Et là, à 18810 kilomètres de ton pays, tu te dis que tu ne t’ais jamais senti aussi chez toi.
    N’oublie pas frérot, du moment que tu as une famille et de vrais amis qui t’aiment, et qui t’accordent de l’importance, où que tu sois, tu te sentiras toujours chez toi, pour peu que tu suives tes rêves…
    Je t’aime

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